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Fernand Braudel : l'héritier des Annales

Une actualité de Jean-Marc
Publié le 28/09/2022
Après nous être intéressé à l'héritage du grand médiéviste Marc Bloch, poursuivons notre traversé avec Fernand Braudel qui aura marqué de son empreinte le XXe siècle et toute une génération d'historien.

«Il est évident que ce fut un moment décisif, pour l'histoire française, que la fondation, en 1929, à Strasbourg, par Lucien Febvre et Marc Bloch, des Annales d'histoire économique et sociale. On me permettra de parler d'elles avec admiration et reconnaissance puisqu'il s'agit d'une œuvre riche de plus de vingt années d'efforts et de réussite, où je ne suis qu'un ouvrier de la seconde heure.»

Tout au long de la carrière de Fernand Braudel plane l'ombre des Annales, dont il s'affirme ici comme un héritier, un épigone, relativisant par là, la portée révolutionnaire des ses travaux. Rappeler la dette de cet auteur à l'égard de l'école des Annales, nous permet de mieux comprendre contre quel type d'histoire, ou plus exactement d'écriture de l'histoire s'est construite l'œuvre du savant lorrain.

Fernad Braudel, après avoir obtenu l'agrégation d'histoire en 1922, enseigna au lycée de Constantine, puis à Alger, jusqu'en 1932. Ici s'est forgé son intérêt pour l'espace méditerranéen. C'est depuis l'autre rive _ une Méditérranée saisie «à l'envers»_ qu'il aborde cette mer intérieure qui n'aura pas été sans influence sur le regard englobant qu'il portait sur l'histoire.

Son itinéraire intellectuel est alors celui de tous les jeunes historiens de son époque, formé à la Sorbonne à l'école de Charles-Victor Langlois et Charles Seignobos ; il est considéré comme une promesse de l'historiographie française de son temps ; mais s'avère curieux des premières avancées scientifiques suscitées par Henri Berr et sa Revue de synthèse historique. Ce parcours qui le promettait à une brillante mais traditionnelle carrière académique fut interrompu par son départ pour le Brésil. Il séjourna et enseigna à Sao Paulo de 1935 à 1937, dans le cadre d'une mission universitaire.

La découverte qu'il fit alors de l'Amérique l'amena, dans l'immédiat, à considérer la Méditerranée «du dehors», peut-on dire, en même temps qu'elle ne resta pas sans inspirer ses travaux ultérieurs.

Ce séjour brésilien est essentiel à un autre titre, puisque Fernand Braudel effectua le voyage de retour en compagnie de Lucien Febvre, qui rentrait lui-même de Buenos Aires. A la faveur de la traversée de l'Atlantique allait se sceller une amitié qui ne s'est jamais démentie. A son retour, Fernand Braudel fut étroitement associé aux Annales (revue historique fondée en 1929 par Marc Bloch et Lucien Febvre) ; alors qu'il enseignait à l'École Pratique des Hautes Études à partir de 1938.

La soutenance et la publication de sa thèse, La Méditerranée et le monde méditerranéen à l'époque de Philippe II en 1949 (ouvrage écrit en captivité durant la Seconde Guerre mondiale) fut un choc en France et bouleversa les canons de l'historiographie traditionnelle. Le grand apport de Braudel, réside dans la définition qu'il donne du passé et qu'il conçoit sous la forme de trois temporalités. En effet, chacun des trois volumes de sa thèse raconte une durée :«Ainsi sommes-nous arrivés à une décomposition de l’histoire en plans étagés. Ou, si l’on veut, à la distinction, dans le temps de l’histoire, d’un temps géographique, d’un temps social, d’un temps individuel. Ou si l’on préfère encore, à la décomposition de l’homme en un cortège de personnages.»

Mais Braudel ne fut pas l'homme d'un seul livre.

L'auteur de Grammaire des civilisations a progressivement acquis, conquis, au fil des décennies de l'après-guerre une position académique. Président du jury de l'agrégation de 1949 à 1955, et élu professeur au Collège de France en 1950 (chaire d'histoire de la civilisation moderne), où il enseigna jusqu'en 1972, il chercha à diffuser et imposer les nouvelles façons de faire de l'histoire. Successeur de Lucien Febvre en 1956, et ce jusqu'en 1972, à la présidence de VIème section de l'EPHE, créée en 1947. Il fut dans cette institution l'un des fondateurs du Centre de recherches historiques en 1949, puis le promoteur du modèle des aires culturelles. Directeur des Annales de 1956 à 1968, il succède à Lucien Febvre, écartant peu après Robert Mandrou, avant de transmettre la responsabilité de la revue à Jacques Le Goff, Emmanuel Le Roy Ladurie et Marc Ferro.

Il fonda, enfin, la Maison des sciences de l'homme en 1962, qui avait pour but d'impulser des programmes de recherches pluridisciplinaires et internationaux.

A travers nous vous proposons de rédécouvrir l'héritage de cet historien qui a eu la volonté de placer l'histoire au coeur des sciences humaines.

L'oeuvre de Fernad Braudel : l'histoire au coeur des sciences sociales