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Christian Boltanski 1944-2021

Une actualité de Jérémy Gadras
Publié le 20/07/2021
En hommage à l’un des plus grands artistes plasticiens français disparu ce 14 juillet. « Je veux qu’il y ait beaucoup de monde dans mon travail, beaucoup d’êtres humains » « Tout ce que nous faisons est entre le personnel et le collectif. L’artiste envoie une sorte de stimulus, et le regardeur va prendre l’image pour lui, se l’approprier et finir l’œuvre »

A celui qui n'aura eu de cesse de témoigner de la nature hautement éphémère de l'Homme, du caractère transitoire du vivant, convoquant dans chacune de ses œuvres le concept de Mémoire comme résistance possible à la mort, à l’oubli, à l’absence, interrogeant par là même la dominance de l’Histoire sur la brièveté de la vie humaine.
Ainsi, le « je » devient l’un des moteurs de ses œuvres, prétexte à un œuvre quasi téléologique, et c’est à travers la fable, la légende, à travers une « mythologie personnelle » que Boltanski façonna sa propre histoire sous nos yeux, flirtant parfois avec la fiction mêlée à l’authenticité de souvenirs. L’omniprésence autobiographique ne fut jamais narcissique, bien moins égocentrique, mais nommait bien plus l’« existant », le « nous » que dissimule chaque être voué à disparaitre et dont seule la/une mémoire permettrait de sortir de la mort, de résister et survivre dans la citation, la référence, l’archive.
Objets de la vie quotidienne façonnés en pâte à modeler, photographies diverses, portraits familiaux, portraits d’anonymes, boites métalliques renfermant des trésors symboliques et personnels, fils, ampoules, lanternes… autant de matériaux périssables et éphémères dont Boltanski usait pour mieux archiver nos histoires sociales, esthétiques, personnelles, existentielles. Des installations souvent monumentales voulues comme les reliques archéologiques des heures sombres de l’humanité (l’Holocauste sera l’un des thèmes itératifs dans ses travaux : fil rouge de sa propre histoire personnelle) et comme les scories d’un temps révolus qu’il nous somme de ne jamais oublier. Lui qui aura essayé de conjurer la mort dans ses œuvres, de jouer avec elle en la détournant, lui ôtant des âmes, il nous quitte aujourd’hui gagnant malgré tout son pari de survivre dans la mémoire collective. Une œuvre profondément philosophique qu’il vous faut découvrir ou redécouvrir.

Pour ne citer que trois œuvres représentatives de ses obsessions, rappelons l’installation Menschlich (« humain ») rassemblant plus de 1200 photographies en noir et blanc collectées pendant vingt années ; Personnes, installation spectaculaire présentée au Grand Palais à la Monumenta de 2010 où s’actionnait une grue survolant un amas pyramidal de vêtements, allégorie tragique de la Mort et de l’Holocauste ; Les Archives du cœur, bibliothèque bâtie sur l’île de Teshima (Japon) archivant les battements de cœur de 70 000 personnes qui ont accepté depuis 2005 de participer à l’œuvre.

« Ce qui est là et que l’on refuse de voir : l’inconscient des images. Il n’y a pas d’image innocente » C.Boltanski

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