De 1968 à 1977, une équipe de quatre chercheuses du CNRS s'installe dans le village de Minot en Côte-d'Or pour une grande enquête de terrain avec les méthodes de l'anthropologie sociale. Afin d'étudier la vie quotidienne des femmes du village, elles ont méthodiquement collecté des informations via des archives, des photographies et des entretiens enregistrés avec les villageois. Leur travail collectif a permis de dresser un portrait détaillé et intime de la vie de ce village.
De cette enquête de terrain, naîtra une œuvre majeure, aujourd'hui rééditée par les éditions Folio : Façons de dire, façons de faire. La laveuse, la couturière, la cuisinière d'Yvonne Verdier.
La chercheuse met en lumière trois figures centrales : la laveuse, la couturière et la cuisinière. Ces femmes incarnent des savoir-faire spécifiques et dessinent les rapports à l'espace, au temps et à la nature de leur communauté. L’ouvrage offre une réflexion profonde à travers des portraits vivants et singuliers et redonne une place et un pouvoir aux femmes.
Un plaisir inégalé de lecture pour le texte de la grande anthropologue et qui n’a rien perdu de sa vivacité et de sa pertinence.
Que nenni, défend Jérôme Alexandre pour qui ce serait avant tout une question de réputation. À rebours du portrait défaitiste que l’on serait tenté de brosser de l’un comme de l’autre, le théologien pose à nouveau les fondements d’un dialogue entre anarchisme et christianisme non seulement possible, mais encore souhaitable. Délaissant les débats de doctrines et d’idées, l’auteur propose de rapprocher histoires, mémoires collectives, valeurs et perspectives. Une forme de protestation, un défi qui consiste à se réinventer sans cesse serait le terreau fertile d’une entente mutuellement bénéfique.
Si ces affinités ne sont pas neuves - le courant anarchiste chrétien les a après tout déjà portées aux XIXème et XXème siècles par l’intermédiaire de grandes voix telles que celles de Jacques Ellul, Ivan Illich ou encore Simone Weil -, Jérôme Alexandre dépoussière nos grilles de lecture, en bouleverse les idées reçues et met à bas les raccourcis trop faciles. Un essai salutaire à travers lequel tout chrétien peut trouver à dépasser la tendance au repli identitaire ou victimaire et renouer avec l’essence du christianisme en tant que manière d’être au monde.
A cette question, Pierre Desproges répondait en son temps oui, mais pas avec n’importe qui lors de l’un des plus mythiques Tribunal des flagrants délires en 1982.
La philosophe Olivia Gazalé se pose elle aussi la question du paradoxe de ce rire qui peut nous faire grincer des dents sans même nous faire sourire. Comment donc dissocier le rire franc du rire qui agresse, qui blesse. Comment tout à la fois garantir le caractère transgressif du rire et retoquer les sarcasmes. Comment démasquer l’humiliation et la discrimination sous la plaisanterie soit disante anodine.
Pour éviter ces pièges, Olivia Gazalé analyse méthodiquement le rire sous toutes ses coutures (physique, anthropologique,..) mais surtout dans ses fonctions car le rire est éminemment social: chaque époque définit ce dont on peut rire et ce qui est proscrit.
Le rire apparaît alors comme une arme à double tranchant qui peut tout à la fois nous permettre de dépasser nos peurs, transgresser les règles, s’émanciper mais aussi stigmatiser, contrôler, exclure, humilier.
Dans cet essai limpide, Olivia Gazalé s’en réfère au fameux sens de l’humour anglo-saxon pour définir une véritable éthique du rire grâce à un pacte humoristique répondant à quatre critères: qui, avec qui, quand et dans quel état d'esprit; quatre conditions qui permettent de préserver ce que le rire a de plus joyeux et de plus humain; quatre garde fous qui autorisent le jeu, l’audace, la licence, l’irrespect sans contrevenir au respect dû à l’autre.
Alors, peut-on rire de tout? Oui certainement, nous répond Olivia Gazalé, mais avec humour.
La particularité de ce travail réside dans le renversement causal de la problématique qu'opère le sociologue en 1963. Les analyses sociologiques à l’époque concevaient la déviance sous un angle essentiellement pathologique, cherchant chez la personne déviante des prédispositions psychologiques; la déviance relevait donc d’un comportement qu’il fallait soigner voire comme un problème à résoudre. A l’inverse Howard Becker propose en premier lieu de concevoir la déviance non comme une particularité individuelle mais comme une création d’un groupe social.
“Les groupes sociaux créent la déviance en instituant des normes dont la transgression constitue la déviance, en appliquant ces normes à certains individus et en les étiquetant comme des déviants”.
La déviance devient donc avant tout le produit d’une interaction entre celui qui commet l’acte et les personnes qui réagissent à l’acte.
Prenant comme objet d’études deux publics qu’il connaît bien, les fumeurs de marijuana et les musiciens de danse (musiciens de jazz employés pour animer les soirées dansantes) le sociologue américain met à jour le processus qui amène une personne à pouvoir transgresser des règles ainsi que le mécanisme social qui assigne la personne comme étant déviante (dénonciation publique, étiquetage, contrôle social).
L’”outsider”, terme employé en anglais pour nommer le déviant se retrouve “étranger” au groupe normatif mais peut aussi considérer que les autres sont étrangers à ses propres valeurs. Un groupe peut ainsi en venir à développer un style de vie marginal, ni en dehors de la loi ni pleinement à l'intérieur du cadre fixé par les règles: l’exemple du groupe des joueurs de jazz de cabarets dansant est un passage d’anthologie dans lequel le non initié apprendra enfin ce qu’est un “cave”.
Lorsqu'il paraît en 1963, le succès est immédiat. Dans les postfaces, Howard Becker raconte de manière passionnante les conditions favorables entourant la réception de ce livre à sa sortie mais aussi l’impact que le texte eut dans la dépénalisation de la marijuana aux Etats Unis.
Les éditions Métailié le publient en format semi-poche et nous offrent ainsi l’occasion de nous replonger dans ce superbe texte, d’une limpidité impressionnante, qui n’en finit pas d’éclairer notre présent.