Dans un lointain futur, le vaisseau Héritage est en direction d’une planète jumelle de la Terre située à quelques 20 000 années de distance. Le but de la mission entreprise par les quatre astronautes, Reiz, Onye, Ryoko et Chana est des plus simples dans les faits : partir sur la planète Geminae dans le but d’y établir une colonie humaine grâce à des embryons cryogénisés embarqués par centaines dans les soutes de l’Héritage. A intervalles réguliers, les colons sortent de leur cryo-stase pour vérifier l’intégrité de l’appareil et des embryons. Mais un jour, lors d’un réveil, ils découvrent sur leurs mains des calcifications étranges que même la chirurgie dermatologique n’arrive pas à soustraire. Attendant de trouver une réponse et un remède, ils continuent leur route vers Geminae…
L’histoire de cette équipage nous est conté par un homme au visage défiguré, errant dans un environnement hostile ou tempêtes et froid extrême sont monnaie courante. Son auditoire se compose d’une petite fille, qui souhaite en apprendre plus sur ses hommes venus des étoiles à la recherche d’un monde meilleur pour s’y établir. Mais les révélations qui parsèment la route ne seront pas toutes bonnes à apprendre.
Philippe Valette livre avec L’héritage fossile une aventure spatiale aux frontières de l’horreur qui touche l’excellence. Avec une narration s’étalant sur deux temporalités distinctes, le récit oscille entre survival en milieu hostile et une quête pour un avenir meilleur qui glisse doucement vers un horizon plus obscur et terrifiant. Ici il est question avant tout de la soif de progrès et de découverte de l’Homme. Jusqu’où serait-il prêt à aller pour étendre son influence et surtout pour s’étendre dans la galaxie. La question de la sauvegarde est ici essentielle, mais aussi celle de la pérennité et de la survie.
Par moment les questions posées, les résolutions et les découvertes des personnages peuvent rappeler certains des pivots narratifs du diptyque de Ridley Scott Prometheus et Alien Covenant (qui malgré ce que le public peut penser, ne sont pas de mauvais films).
Graphiquement, Valette propose une symbiose entre modèles 2D réalisés à la main qui viendront s’ajouter sur une modélisation 3D des décors et environnements. Le tout magnifié par un rendu final en compositing.
Le récit de Philippe Valette est en fin de compte une exceptionnelle bande dessinée de science-fiction qui mêle les genres et se les approprient avec brio pour nous livrer une œuvre puissante, belle, réflexive et intense. Un grand roman graphique !
David Zimmerman a 33 ans et est photographe. Il vit seul et passe son temps libre avec son meilleur ami Harry. Le début de notre histoire se passe le 31 décembre, le soir, pendant le réveillon du nouvel an. David n’est pas très enthousiaste à l’idée de passer la soirée entouré d’inconnus et en présence de son ex-compagne. Mais lors de la soirée il reconnaît quelqu’un dans la foule, une jeune femme brune qu’il avait déjà remarqué lors d’un précédent travail quand il devait photographier deux heureux mariés. La belle brune travaillait comme serveuse et s’était esquivée suite à un petit incident. Drôle de coïncidence pour David. Mais ce dernier, trop obsédé par le souvenir de ce beau visage, décide d’aborder la jeune femme. S'ensuit une nuit passionnée où les deux corps échangent et se confondent.
Le lendemain matin, David se réveille avec un mal de tête abominable. Mais première chose étrange, il se réveille chez lui et non dans l’appartement de la veille. Et alors qu’il s’extirpe du lit, David croise son regard dans le miroir de la chambre. David n’est plus David, enfin si mais ce n’est plus son corps. David vient de se réveiller dans le corps de la belle inconnue. Après avoir réalisé que tout ceci n’est pas une hallucination ou un mauvais rêve, David va essayer de retrouver la propriétaire de son nouveau corps. Mais ce qu’il va découvrir tout au long de son enquête va perturber son monde et le plonger au cœur d’une spirale incontrôlable…
Lucas Harari et son frère Arthur s’associent pour nous livrer, avec Le cas David Zimmerman, un thriller fantastique et hypnotique de haute volée qui vous marquera longtemps même après avoir tourné la dernière page.
Génie graphique et scénaristique se trouvant derrière les succès de L’aimant et de La dernière rose de l’été, Lucas Harari revient nous marquer de son trait si particulier en brossant des personnages fragiles, durs et mystérieux. Foisonnant de détails d’une précision académique, presque chirurgicale, ses environnements ne sont pas en reste. Tout baigne dans une sorte de désespoir ambiant où les couleurs sombres illustrent à merveille l’état d’esprit des protagonistes perdus dans un brouillard opaque de mystères où les réponses tardent à venir. Plus le récit avance, plus le dessin de Lucas Harari épouse une palette grise et bleue enfermant un peu plus les personnages dans leur prison de chair.
Au scénario, Arthur Harari, auréolé de son succès sur l’excellent Anatomie d’une chute (sur lequel il a conjointement travaillé avec son épouse et réalisatrice du film, la talentueuse Justine Triet), livre une écriture incroyable, sensible et envoûtante. Nous lecteurs, sommes absorbés par ce mystère, celui de cet étrange changement de corps. Un mystère qui ne se limite pas qu’au simple cas David Zimmerman. Une bien belle et énigmatique enquête se met alors en marche. Mais au fond est-ce cela qui motive les personnages et le scénario ? La recherche de leur corps ? Ou est-ce plutôt l’acceptation de celui-ci ? Les pistes narratives décortiquent peu à peu la psychologie des personnages piégés par une force qui les dépassent.
Avec Le cas David Zimmerman, les frères Harari livrent un récit puissant qui de part son éclectisme et sa maîtrise des genres saura plaire au plus grand nombre tout en vous portant dans des territoires inconnus.