Beaucoup d’entre nous, à la lecture de cette formule interrogative, seraient déjà tentés de prendre une position pour ou contre, et de la défendre. Nous ne ferions pourtant que réchauffer un débat ancien dont les arguments principaux sont connus. Bien imprudent, d’ailleurs, celui qui s’aventurerait à apporter d’emblée une solution au problème de l’existence de Dieu, car celui-ci soulève en réalité bien plus de questions qu’il n’apporte de réponses.
De quel Dieu parle-t-on ? Prouver Dieu revient-il à prouver une religion ? Qu’entend-on par « exister » ? Quelles notions oppose-t-on à travers le prisme de son existence ou de sa non existence ? Qu’impliquerait le fait de prouver enfin l’une ou l’autre des hypothèses ? Peut-on se départir des oppositions entre croire et savoir, entre foi et raison ? Celui qui plaide en faveur d’une hypothèse contre l’autre peut-il se défaire de son biais initial ? L’affaire n’est pas si simple et l’on comprend que le problème de l’existence de Dieu s’impose avant tout comme une extraordinaire et vertigineuse expérience de pensée.
Philosophie et théologie se sont de longue date emparées du problème et ont produit nombre d’œuvres magistrales, renouvelant sans cesse les termes du débat et faisant de cette question le vivier d’une réflexion extrêmement riche. Bien loin d’éloigner ces questions, les progrès d’un savoir scientifique remontant toujours plus loin vers les origines de l’univers n’ont fait que raviver l’intérêt d’une approche métaphysique de notre place dans le tout et nourrir les dialogues entre des disciplines que l’on a peut-être trop tendance à opposer.
Ce n’est donc pas tant à la solution du problème, que ce dossier vous propose de vous intéresser, qu’à ce que le seul fait de poser la question a produit de réflexions et de pensées au cours des siècles. Autrement dit, au raisonnement en lui-même plutôt qu’à la réponse qu’il s’efforce de justifier, car c’est encore le premier qui ne cesse de nous enrichir quand la seconde, puisqu’elle a atteint son objectif, met un terme à toute réflexion.
Ce 400ème anniversaire de la naissance de Blaise Pascal est d’ailleurs l’occasion de se souvenir de son fameux pari : « … disons : “Dieu est, ou il n’est pas.” Mais de quel côté pencherons-nous ? La raison n’y peut rien déterminer : il y a un chaos infini qui nous sépare. Il se joue un jeu, à l’extrémité de cette distance infinie, où il arrivera croix ou pile. Que gagerez-vous ? Par raison, vous ne pouvez faire ni l’un ni l’autre ; par raison, vous ne pouvez défendre nul des deux. Ne blâmez donc pas de fausseté ceux qui ont pris un choix ; car vous n’en savez rien. (…) Estimons ces deux cas : si vous gagnez, vous gagnez tout ; si vous perdez, vous ne perdez rien. Gagez donc qu’il est, sans hésiter. ». Et de se rappeler que, pour censé que paraisse le pari pascalien, lui aussi a connu ses propres critiques… Là est toute la saveur de l’entreprise.
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